to all the people i hurt ; (haneul)

(✽) Enfant disparate, fils de militaire à la retraite précoce ; tu as grandis avec ce père trop jeune, avec cet homme qui a pourtant fait de son mieux pour être à la hauteur des responsabilités qui sont les siennes. Petit garçon silencieux qui attendait que son paternel soit disponible, petit garçon convaincu d’avoir été abandonné par sa mère ; tu as toujours eu l’habitude d’être relégué au second plan. Ce n’est de la faute de personne, vraiment. Ton père avait de trop nombreuses responsabilité, s’engageant dans plusieurs associations ici et là, faisant de son mieux pour construire un monde un peu meilleur pour les soldats d’aujourd’hui et de demain. Ancien militaire désabusé par le système, il était bien placé pour savoir ce dont il était question. (✽) De la Corée du Sud, tu ne gardes qu’un souvenir très flou ; divers voyages organisés par ton paternel pour garder un contact somme toute tenu avec sa famille, des regards méfiants que l’on t’adressait, des grand-parents un peu froids, qui en ont toujours voulu à leur fils de concevoir un enfant en dehors des liens sacrés du mariage … Tu n’as jamais vraiment été accepté, c’est un fait avec lequel tu as fait ta paix. Tu parles malgré tout un coréen un peu cassé, un coréen plus que maladroit. Tu considères l’anglais comme ta langue maternelle, ayant passé toutes tes jeunes années sur le territoire américain, la Corée n’étant qu’une destination de vacances pas très agréable. (✽) Scolarité somme toute médiocre ; tu aurais pourtant aimé briller de part son intellect, tu aurais aimé être un élève dont on chante les louanges de manière régulière. Tu voulais que ton père soit fier de toi. Tous tes espoirs furent cependant réduits en poussière par une dyslexie et un TDAH contre lesquels tu ne pouvais lutter. Tu as du te rendre à l’évidence que tu ne brillerais pas, que tu seras éternellement médiocre ; la réalisation fut assez dure à digérer, tu dois bien l’avouer. Mais ta vie ne fut que plus facile après coup. (✽) Avant le camp Jupiter, avant que tu ne découvres ton ascendance divine, tu as été un petit garçon perdu. Souvent livré à toi-même, rarement étreint par ton père et incapable d’exprimer tout ce qui te contrarie, tout ce qui te dévore lentement de l’intérieur. Alors tu exploses ; de colère, de tristesse, de joie, d’excitement. Tu exploses sans te retenir et, bientôt, tu deviens ce gamin trop émotif pour qui on a que trop peu de patience. Les adultes n’ont de cesse de te reprendre, de forcer sur toi ce modèle de masculinité que l’on considère à présent comme toxique ; big boys don’t cry, qu’ils te répètent inlassablement. Et toi, tu continues de pleurer en silence. (✽) Et malgré les absences répétées et étendues de ton père, tu ne lui en as jamais vraiment voulu. Tu sais qu’il t’a aimé, tu sais qu’il a fait de son mieux ; il était si jeune lorsque tu lui as été confié, il venait à peine de fêter son vingt-troisième anniversaire. À l’époque, il avait une carrière militaire prometteuse, il avait tout pour lui … Puis tu es arrivé et il a dû faire des choix ; il a abandonné sa carrière pour s’occuper de toi. Il a décidé d’aider les soldats à se réhabituer à la vie civile, pensant que cela serait beaucoup moins chronophage … Il s’est trompé, cependant il a malgré tout fait de son mieux. Il était là quand tes professeurs souhaitaient le rencontrer, il n’a jamais manqué l’un de tes anniversaires, il était toujours présent à Noël ou pour toutes les autres fêtes que vous célébriez. Il n’était pas présent au quotidien, mais il était présent lorsque cela comptait ; c’est bien là tout ce qui importe. (✽) Tu as grandis avec une nourrice. Parce que ton père voulait ce qu’il y avait de mieux pour toi, parce qu’il avait peur de ne pas y arriver seul … Et grand bien lui en a pris ; cette nourrice, répondant au doux nom de Jane, tu l’as adoré. Elle était douce, elle était tendre. Mais plus que cela encore, elle était compréhensive et n’a pas pris la fuite lorsque ton TDAH a pointé le bout de son nez. Jane a été présente dès lors que tu n’avais que quelques mois jusqu’à ton cinquième anniversaire. Son départ t’a véritablement brisé le coeur ; elle ne pouvait pourtant pas rester, Jane. Elle devait reprendre ses études, elle voulait plus que cette vie de gardienne d’enfants. À l’époque, tu n’as pas compris ; tu as juste ressentis son départ comme un terrible abandon. Tu as tant pleuré que tu t’en es presque rendu malade. (✽) Tu débarques au camp Jupiter alors que tu n’as que sept ans. Un faune vient te chercher et te raconte une histoire que tu es bien trop jeune pour comprendre ; cela importe peu, cependant, parce que ton père comprend, parce que ton père sait. Alors il te prépare un sac, il te sert fort dans ses bras et t’embrasse tendrement sur le sommet du crâne. Et te voilà parti. San Francisco, ça te change de Détroit. Le camp Jupiter, ça te change de ta vie jusque-là. (✽) Le verdict tombe ; fils de Bellone. Et dès que cela se sait, dès que tout le monde apprend qui est ta mère, tout le monde s’attend à ce que tu deviennes un petit génie militaire. Un bon petit soldat. En réalité, il n’en fut rien ; si tes dons te donnaient un avantage non-négligeable sur le champ de bataille, tu n’avais pas le tempérament d’un guerrier. Tu étais trop doux, trop sensible pour être le bon petit soldat que tout le monde espérait. (✽) Tu as fait la Légion, comme tout le monde. Tu l’as fait parce que tu le devais, pas parce que tu en avais envie. Tu l’as fait un peu à contrecoeur, parce qu’on t’imaginait bon soldat, alors que tu n’avais pas la tête à ça. Tu n’as jamais évolué au sein de ta cohorte comme tout le monde pensait que tu le ferais ; tu avais les prédispositions, après tout. Il ne te manquait que la volonté. Tu ne diras pas qu’on te l’a fait payer, ce manque d’ambition. Mais un peu quand même ; on te raillait pour essayer de te faire réagir, on se moquait pour t’énerver et obtenir une réaction de toi. Tu n’as jamais rien dit, rien fait à ce sujet. Tu as juste enduré, ton coeur se brisant un peu plus à chaque fois. (✽) Tu as toujours été coeur d’artichaud. C’est un fait que tu ne peux nier, un fait qui n’est que cela ; un fait. Dans ton coeur, il y a eu Lily, il y a eu Alice, il y a eu James, il y a eu Samuel … Petites-amies et petits-amis, des relations qui ne durent jamais bien longtemps ; parce que tu tombes amoureux facilement, mais tu tombes en désamour tout aussi rapidement. Tu as brisé des coeurs tout comme ton coeur a été brisé, mais tu ne l’as jamais fait volontairement ; tu as toujours été très sincère dans toutes tes relations, tu as toujours été très honnête avec tes sentiments. Tout ne s’est pas toujours bien fini, à ton plus grand regret, néanmoins il y a bien quelques relations qui se sont achevées doucement, sans le moindre accro ; tu en gardes un souvenir tendre et chaleureux. (✽) Lorsque tu as finis la Légion, tu l’as quitté sans un regard par-dessus ton épaule ; c’est avec un soulagement non feint que tu t’es défais de ta cohorte, abandonnant tes frères et sœurs d’armes sans réfléchir. Tu aurais pu quitter le camp Jupiter, aussi, faire ta vie ailleurs et te défaire des exigences qui te hérissaient le poil. Tu aurais pu. Mais tu ne l’as pas fait, car dans le fond, le camp Jupiter était ton foyer. Tu es resté, tu as continué de grandir et d’évoluer en tant que jeune homme et demi-dieux. (✽) Ton choix de carrière en a surpris plus d’un ; toi, le fils de Bellone … aide-soignant. En effet, cela avait quelque chose d’étonnant. On a bien essayé de te dissuader, mais tu as persévéré. Et aujourd’hui, tu es plutôt fier de ce que tu fais ; tu aimes ton métier et tu le fais bien. (✽) Tu as gardé de bons contacts avec ton père, quittant parfois le camp Jupiter lorsque tu le pouvais pour lui rendre visite. Celui-ci ne cesse jamais de répéter qu’il est fier de toi, de tes choix, de l’homme que tu es devenu. Et ça te met du baume au coeur, parce que, au moins, il y a bien une personne en ce bas monde que tu n’as pas déçu. (✽) Ta mère, tu évites de trop y penser. Tu ne la détestes pas, mais tu n'es pas certain de l'aimer non plus. C'est un peu de sa faute si tu as déçu tout le monde, c'est parce qu'elle a une bien sinistre réputation que tes épaules se courbent sous le poids du fardeau qu'elle t'impose. Il y a toujours un noeud dans ta gorge quand tu penses à elle, cette douleur dans ta poitrine quand tes pensées se tournent vers elle. (✽) Kvalir, tu ne sais pas trop quoi en penser. Tu as suivi le mouvement sans trop réfléchir. Tu as pris le temps pour dire au revoir à ton père, tu as pris le temps de faire tes valises et à Kvalir tu es allé. À Kvalir tu t’es installé, à Kvalir tu t’es établi. Tu fais de ton mieux pour te faire à cette nouvelle vie que tu n’es pas sûr d’apprécier.