i am an island ; (zahra)

trigger warning; déni de grossesse, négligence/abandon d'enfant

(✽) Ta mère ne t’a jamais désirée et ça s’est toujours ressenti ; il y avait un énorme fossé entre vous, un vide si grand qu’il était impossible de ne serait-ce que songer à le franchir. Tu as pourtant fait de ton mieux, Zahra. Tu t’es faite fille parfaite pour la satisfaire enfin, tu t’es faite enfant discrète et silencieuse pour ne pas la déranger. Mais cela n’a jamais vraiment importé ; Maman a toujours eu cette rancoeur amère à ton égard. Tu as gâché sa vie, tu l’as toujours plus ou moins su, bien qu’elle ne l’ait jamais ouvertement avoué. Elle ne s’est jamais vraiment remise de ce 3 août fatidique où elle a donné la vie, sans savoir qu’elle portait en elle une vie nouvelle. Traumatisme qui l’a marquée à jamais et qui l’a rendue terriblement fragile. (✽) Tu es née prématurée d’un mois. Pas grand-chose, dans le fond. Mais cela couplé au fait que ta mère n’a jamais rien su de sa grossesse … Eh bien les médecins ont été pendant un long moment inquiet à ton sujet ; bébé silencieux et minuscule, on te croyait malade … Il n’en était rien cependant, tu étais juste un petit format et il semblait que tu ne voulais pas déranger ta mère, que tu pleurais seulement en cas d’extrême nécessité. Déjà si jeune, tu semblais avoir conscience de n’être qu’un embarras pour celle dont tu as toujours voulu l’amour. (✽) Toute petite, tu t’es toujours retrouvée livrée à toi-même. Solitude imposée qui ne te dérangeait pas tant que cela au début ; fillette indépendante et imaginative, tu n’avais aucun mal à t’occuper seule, lorsque Mama n’était pas là. Puis tu as grandis, Zahra. Tu es allée à l’école et tu as appris qu’il n’était pas normal que Mama te laisse seule aussi fréquemment. Un jour, tu lui as demandé pourquoi elle ne restait pas avec toi, pourquoi elle partait si souvent en te laissant derrière sans, semble-t-il, une once de regret ou ne serait-ce que d’arrière-pensée. Mama a dit qu’elle avait des choses importantes à faire. Plus importantes que toi. Toujours plus importantes que toi. Et ça a brisé ton petit coeur, Zahra. Parce que tu voulais qu’elle te voit enfin, qu’elle t’aime. Même si ce n’était qu’un tout petit peu. Tu voulais qu’elle t’aime. (✽) Mama ne t’aimera jamais. La révélation te frappa alors que tu venais de fêter ton sixième anniversaire. Enfin, fêter est un bien grand mot … Tu n’as jamais vraiment célébrer l’occassion, tu as toujours vécu la journée du 3 août dans une atmosphère lourde ; Mama se refusait toujours de t’accorder le moindre regard, de t’adresser la parole lors de cette journée. Tu n’as jamais eu de cadeaux, tu n’as jamais reçu de vœux d’anniversaire ou quoique ce soit d’autre. Cette fameuse révélation t’est apparue quand Mama a ramené un homme à la maison. Un homme dont tu ignorais tout et qui ne semblait pas t’apprécier plus que cela. Rapidement, il devint un repère fixe de ton existence ; Mama et lui s’aimait, Mama et lui te mettaient à l’écart de tout. Bientôt vint le mariage. Bientôt vint cet enfant désiré, qui possèdera tout ce qu’on t’a toujours refusé. (✽) Zyad, ton petit frère, est né le 15 janvier 2003. Tu n’avais que sept ans, à l’époque, mais tu te souviens du gouffre qui s’est ouvert dans ton coeur, tu te souviens de ton souffle qui s’est coincé dans tes poumons, te faisant tourner la tête. Tout de suite, tu as vu la différence entre lui et toi. Tout de suite, tu as vu qu’il aura des parents aimants et attentionnés, là où tu n’as eu que rejet et abandon. Depuis le 15 janvier 2003, tu n’es plus la même, Zahra. De voir ta mère si heureuse en tenant le nouveau-né entre ses bras fatigués, de voir son mari si ému en posant les yeux sur son fils … Tu t’es demandée alors ce que tu avais pu rater pour qu’on t’en veuille à ce point. (✽) D’aussi loin que tu te souviennes, tu as toujours fait des cauchemars. Et il n’y a jamais eu personne pour te consoler après coup. Enfant mal-aimée, constamment rejetée par celle qui l’a, sans le savoir, portée huit mois durant, tu as du apprendre à faire avec. Tu t’es souvent réveillée en pleurs, crevant d’envie d’aller te réfugier dans les bras de cette mère froide. À la place, tu étouffes tes sanglots dans ton oreiller, te noyant presque dans ces larmes que tu ne parvenais pas à ravaler. Les nuits sont devenues ton pire ennemi, t’endormir est devenu un challenge presque insurmontable. Tu détestes le sommeil, Zahra, parce que tu en as terriblement peur. (✽) Tu es perdue, Zahra. Neuf ans à peine et déjà tu prends des décisions de grande. Tu en as eu assez de les voir jouer à la jolie petite famille heureuse sans toi, tu en as eu assez d’être si transparente. Alors, dans un élan de jalousie et de colère aveuglant, tu as pris toute ta petite vie et tu l’as fourré dans un vieux sac à dos tout poussiéreux. Tu étais certaine que personne ne chercherait à te retenir, mais tu as quand même attendu que tout le monde se couche pour quitter le domicile familial. Tu es partie, Zahra, parce qu’il le fallait bien. Tu ne pouvais plus vivre là-bas. (✽) Tu as persévéré ; des semaines durant, tu as survécu difficilement dans les rues de Khénifra, ville où Mama et son mari ont décidé de s’établir suite à leur union. Tu as erré, Zahra, puis tu as quitté la ville ; tu as marché le long de la route, prenant la fuite dès que l’on s’approchait de toi d’un peu trop près. Puis, on a fini par te trouver. Tu ne savais pas à quel point tu avais besoin d’être trouvée jusqu’à ce qu’on te prenne par la main et qu’on te tire dans une direction en te promettant sécurité et confort. Enfin, enfin, on te parla de ton père, sujet que ta mère avait tout bonnement bani. Ton père ce divin respectable, ton père auquel tu ne pensais que rarement. À neuf ans, la chose t’apparaissait comme impossible. Puis tu es arrivée au camp Amon, ton protecteur te guidant au travers des entrailles du camp pour t’expliquer que tu n’étais pas seule, que tous ceux qui t’entouraient étaient des descendants divins. Demi-dieux est le terme approprié, même si, au moment de la découverte du camp, tu ne te sentais pas particulièrement divine. (✽) Fille de Sobek, le verdict est tombée assez rapidement. Tu n’as pas attendu bien longtemps pour que ton paternel te reconnaisse, chose que tu as trouvé assez surprenante ; tu étais habituée à être constamment ignorée, constamment délaissée … Aussi de savoir que ton père était si enclin à te clâmer comme sien, eh bien ça t’a fait quelque chose, ton coeur a loupé un battement. (✽) Tu as rapidement fait la rencontre de Sanaa. Tu l’as vue pour la première fois trois jours après ton arrivée. La fillette avait deux ans de plus que toi et venait elle aussi d’arriver au camp (elle t’a devancé d’un mois) ; tu ne sais pas vraiment ce qui l’a attiré vers toi, ce qui l’a fait graviter dans ton orbite. Tu sais juste qu’elle t’a adressé un sourire chaleureux et avenant, un de ces sourires que tu aurais voulu que ta mère t’adresse. Ça t’a coupé le souffle. Puis Sanaa est venue te voir, t’attrapant par la main et te proposant de te faire visiter le camp. Tu n’as pas pu refuser et, depuis ce jour-là, vous étiez devenues inséparables. (✽) Tu as trouvé ta place au camp Amon ; pour la première fois de toute ta courte existence, tu te sens enfin appartenir quelque part. Désireuse de briller comme tes compagnons, tu te donnes à fond lors des entrainements, tu fais des efforts monstres pour apprendre tout ce que tu as besoin d’apprendre. Et tu brilles enfin, Zahra ; tu es une combattante talentueuse et une fine stratège. On te complimente, on te tape sur l’épaule pour te féliciter et, enfin, tu fais plus que simplement exister ; tu vis, la sensation est si enivrante. (✽) Découverte de ton premier pouvoir alors que tu n’as que onze ans. Lors d’un entrainement intensif, Sanaa se retrouve en difficulté. Désireuse de protéger ta meilleure amie, tu as sentis cette sensation chaleureuse monter en toi et se propager tout autour de ton être. Sanaa, qui était jusque-là en position bien peu avantageuse, a réussi à reprendre le dessus sur son adversaire et est parvenue à terrasser son adversaire. Ainsi, tu es devenue celle vers qui on se tourne lorsqu’un combat semble perdu d’avance. (✽) Ton second pouvoir est découvert lorsque, sous l’emprisse d’un excès de colère terrible, tu as faillis noyer celui qui te harcelait vicieusement depuis quelques mois déjà. D’un coup, tu ne l’as plus supporté ; et le voilà pris par l’eau terrible qui sortait du sol, le voilà pris par la colère d’une crue terrible. Le champ d’entrainement s’est retrouvé partiellement inondé. Et quand, enfin, tu t’es calmée, le garçon n’a plus osé te regarder. Tu as bien entendu été très fermement réprimandée, Zahra, car il n’est pas concevable d’attaquer un autre demi-dieu, vous devez vous serrez les coudes quoiqu’il arrive. Et il a été impératif que tu apprennes à contrôler cette nouvelle capacité. Tu ne pouvais plus te laisser emporter par tes émotions de la sorte. Quelle ne fut pas la surprise de tout le monde de constater, quelques jours plus tard, que le sol que tu as innondé bien malgré toit se retrouve à être bien fertile ; là où il n’y avait que de la terre sèche auparavant, de l’herbe bien verte s’était mise à pousser. Tu es bien la digne fille de Sobek, est ce que tu as entendu se murmurer autour de toi. (✽) C’est à l’âge de quatorze ans que tu fais la rencontre de Souleyman. Tu as rencontré beaucoup de monde, au camp Amon, tu t’es fait plein d’amis, de connaissances, parfois des presque ennemis. Parce qu’on ne peut pas plaire à tout le monde, parce qu’il est tout à fait normal de ne pas avoir d’atomes crochus. Tu luttes beaucoup avec le concept de ne pas être appréciée par tout le monde, tu te débats avec les faits quand Souleyman fait irruption dans ta vie. Au départ, tu ne sais pas trop dans quelle catégorie le ranger, ami ou presque ennemi, parce que vous passez beaucoup de temps à vous châmailler, mais ça ne va jamais bien loin. Au final, c’est Sanaa qui décide pour toi ; vous ne tardez pas à former un trio terrible qui fait trembler le reste du camp. Ensemble, vous faites les quatre cent coups et plus encore. (✽) Les années passent et tu continues de grandir. Les portes de l’âge adulte commencent doucement à s’ouvrir et tu changes ; tu te fais plus tempérée, moins impétueuse. Tu remarques que l’on n’apprécie guère tes réactions émotives, que l’on préfère lorsque tu ne dis rien. Alors tu te fais silencieuse pour plaire au plus grand monde, tu te fais discrète pour qu’on t’apprécie davantage. Vieux réflèxes d’une enfance brisée qui remontent à la surface. C’est plus fort que toi. (✽) Tu as aimé Souleyman comme tu n’as jamais aimé personne. Et si tes sentiments étaient réciproques, ce ne fut néanmoins pas suffisant ; vous n’aviez pas les mêmes attentes, vous n’aviez pas les mêmes rêves du futur et ce fut ce qui causa votre perte. La décision fut prise que vous étiez bien mieux en tant qu’amis plutôt qu’amants. Et s’il y a ce goût amer qui te reste un peu en bouche, ce goût de ce qui aurait pu (du) être si tu n’étais si difficile, s’il n’était pas si fier … Tu restes une amie fidèle et présente pour Souleyman, comme le jeune homme peut l’être pour toi. (✽) Le déménagement à Kvalir est un véritable déchirement ; le camp Amon a toujours été ton seul et unique refuge, ton chez toi et devoir partir, le laisser derrière toi, te brise le coeur bien plus que ce que tu veux bien l’admettre. Tu te plies cependant à la demande des Dieux, mais ce n’est pas sans faire connaître bruyamment ton mécontentement. Tu pars, ton sac sur l’épaule et le regard empli d’éclairs furieux. Tu t’installes à Kvalir et tu es tout simplement submergée par la présence des autres panthéons ; tu ne sais trop quoi penser d’eux, ni comment intéragir avec eux. Méfiante et incertaine, tu as du mal à t’intégrer.

en vrac; Tu as toujours un mauvais sommeil ; cauchemars et insomnies peuplent tes nuits. Mais pire que cela encore, lorsque tu parviens enfin à dormir un peu, tu es souvent victime de paralysie du sommeil. Ces épisodes sont totalement imprévisibles et te laissent toujours sur le carreau ; tu as cette hallucination de quelqu’un assit au pied de ton lit et qui t’observe sombrement qui te hante. Tu ne distingues rien de cette figure à part une silhouette sombre et des yeux jaunes luisants. Toujours est-il que la vision te terrifie à chaque fois. (✽) Tu as une cicatrice sous le menton, souvenir de ton premier entrainement ; tu as faillis t’empaler sur ton propre poignard en trébuchant sur tes propres pieds. C’est un véritable miracle que tu ne te sois qu’amocher le menton. Cinq points de suture ont été nécessaires pour refermer la plaie. (✽) Féministe assumée que l’on se plait parfois à décrier ; tu es certaine du combat que tu mènes et tu ne baisseras pas les armes. Tu ne vaux pas moins qu’un homme, tu exiges donc qu’on te respecte comme on le ferait pour un membre du sexe opposé. (✽) Sanaa te reproche assez fréquemment le fait d’avoir perdu ta spontanéité. Et si tu entends bien ce qu’elle a à dire, si tu sais qu’elle dit ça en étant ta meilleure amie (qui se fait, de surcroit, du souci pour ta personne), tu ne sais jamais comment lui répondre. Et si tu comprends, en un sens, que ce ne sont pas vraiment des reproches, tu ne peux pas t’empêcher de les prendre comme tel. (✽) Ta séparation avec Souleyman, bien qu’en bons termes, fut quelque peu difficile ; tu es restée jalouse un assez long moment. Deux ans (de tes dix-neuf ans à tes vingt-et-un ans), tu es restée avec lui. Ce n’est que depuis tout récemment que tu parviens enfin à te défaire de cette jalousie mal placée. Tu ne veux pas l’empêcher de trouver le bonheur, comme tu ne veux pas être cette ex jalouse qui a du mal à tourner la page. Il te faut juste un peu plus de temps. À présent, tu l’encourages même à suivre son coeur et ses envies. (✽) Tu n’as rien contre les autres panthéons, tu ne sais juste pas comment les aborder. (✽) Tu es allergique aux produits laitiers.